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Le jour où j'ai déverrouillé mon esprit...



«Faites que votre tableau soit toujours une ouverture au monde.» (Léonard de Vinci)


On ne connaît rien du monde dans lequel on vit. Niente. Nothing. Nada. Içkimse yok. On croit tout savoir comme de vraies encyclopédies savantes, on pense posséder la divine vérité, avoir découvert le secret de la Caramilk, le ticket doré pour le bonheur, ou on se sucre le bec avec nos convictions et on se fout un doigt dans l'œil ultra profond jusqu'au cerveau en ébullition étouffant dans notre déni puant. On a tendance à s'enfermer à double tour dans ses habitudes, ses idées préconçues et ses inhibitions. Si Enrico Macias chantait: «Ouvre-moi la porte, toi qui a la clé de la grande école du monde», le jour où j'ai ouvert cette porte, où j'ai déverrouillé mon esprit pour sortir véritablement de mes acquis comme un Jack-in-the-Box «popant» sans avertissement, j'ai décidé que toutes mes peurs ne valaient pas la peine d'être entretenues le moins du monde. Enrico, il l’avait l’affaire. Les peurs ne sont que des freins sur lesquels on appuie trop fort et qui, dans un crissement retentissant, risquent d'user à la corde les jantes de nos vies. Il faut y aller mollo-marshmallow avec les genoux osseux qui claquent pour tout et rien et les sueurs froides inopinées. Pour notre bien. Parce que pour chaque gros méchant loup que l’on croise, on rencontrera dix belles brebis bien laineuses qui seront très heureuses dans le douillet confort de notre existence. Et même si le loup sort les crocs, c’est le petit chaperon rouge qui gagne à la fin.

Se concentrer sur l'essentiel


La superficialité est une gangrène qui se répand à la vitesse de la lumière (j’allais écrire «en criant ciseaux», mais pourquoi je crierais «ciseaux», hein?) Parfois, on voit bien ce que l'on veut voir. St-Exupéry a écrit que «l'essentiel est invisible aux yeux» pour illustrer cette vérité universelle. My God Ti-toine que tu avais raison big time, man! L'être humain n'a d'ailleurs pas toujours envie de voir ce qui lui pend sous le nez (un filet de morve bien vert, par exemple), car ça peut choquer, brasser la soupe chaude des émotions à grands mouvements jusqu’à ce qu’on s’ébouillante avec. Pourtant, quand on ouvre les yeux bien grands, l'essentiel est là. On peut déjà essayer de s'entourer de gens honnêtes, et je ne parle pas ici de ceux qui respectent la loi. L'honnêteté est la capacité de dire les vraies choses quand ça devient nécessaire de les exprimer à haute voix, même si ça shake des paradigmes comme des fesses sur une piste de danse. C'est aussi la capacité de ne pas se mentir à soi-même, et si vous saviez comme c'est la mer à boire, par moments! Plusieurs personnes se racontent des histoires et se «bluffent», s'ensevelissent sous un amoncèlement de bobards et se la pètent comme des pros de la «broue». Heille. Stop right now, thank you very much [1], et embrasse l’amour, le partage, l’honnêteté et la bienveillance. Sois gentil (gentil chien-chien), choisis bien tes priorités (et aligne-les aux miennes, si possible). Après tout, la rancœur et la hargne, ça fait rider notre face de pruneau et tout comme le fruit, ça fait royalement chier.

Inhiber notre peur d'avoir peur


Non mais, on a le don de craindre l’inconnu comme son ombre. On capote avec des riens à chaque occasion! Déjà, ça commence jeune, la fermeture d’esprit. Le fait d’avoir peur de goûter quelque chose s’appelle la néophobie alimentaire [2], une bien belle manière de nommer le «j’ai envie de vomir quand je mange des légumes». Avant de déclarer qu’un enfant n’aime pas un aliment, il faudrait idéalement l’y avoir exposé de quinze à vingt fois. Comme plusieurs parents n’ont pas le courage de se rendre jusqu’au bout du processus, ça fait des enfants capricieux pour rien… et par la suite, des adultes peureux et fermés à l’idée même d’un dépaysement gustatif. Je me rappellerai toujours de Rob, un Américain avec qui j’ai voyagé en Égypte, qui partait à la chasse aux PFK et aux McDo dans les méandres de Luxor, d’Aswan et du Caire, et qui tournait la tête à chacune des délicatesses locales qui lui étaient présentées dans l’hospitalité la plus totale. Je me suis dit à l’époque qu’il était vraiment dommage de gaspiller sciemment une si savoureuse opportunité. Déjà, avoir peur d’une telle banalité, goûter, c’est un symptôme de peurs plus grandissimes. On commence par dire non au brocoli et au filet de turbot, puis, des années après, on fait dans son froc à la simple idée d’échouer au boulot ou de rater sa vie de couple. Remarquez bien qui sont les gens aux papilles les plus sélectives autour de vous. Ils sont aussi souvent les plus craintifs dans tout. La peur d’avoir peur, ça nous attrape par les entrailles, ça nous glace le sang, ça embrouille notre esprit sans crier gare… Et si on ne bat pas le fer pendant qu’il est chaud, on se réveille à quatre-vingt-dix ans avec une amertume en bouche, celle d’avoir passé à côté de ses pompes en véritable spécialiste de l’évitement. Je nous imagine très bien frétiller sur notre chaise berçante dans notre résidence pour ainés à radoter à l’unisson du bon vieux temps où nous aurions pu faire ceci et cela entre deux bouchées de mou. Mâchouiller des regrets jusqu’à notre dernier souffle, tout ça parce qu’on n’a pas osé goûter au rutabaga plus de dix fois dans notre tendre jeunesse. Cinq fois de plus et notre vie aurait pu être métamorphosée à jamais…

Découvrir les différentes recettes du bonheur


Avec le temps et les expériences de voyage, j’ai découvert quelque chose qui a carrément changé ma vie : Il n’y a pas qu’une seule manière d’être heureux. Je dirais même plus : Les recettes de bonheur sont aussi variées que le nombre d’êtres humains. Avant de déménager au Mexique quand j’avais dix-sept ans, je n’aurais jamais pu imaginer qu’une famille sans voiture, sans téléviseur et sans machine à laver pouvait aspirer au bonheur au même titre que ma belle petite famille parfaite. Erreur! La pauvreté n’est pas un stoppeur aux rires et aux choses simples mais efficaces permettant d’atteindre l’apothéose d’un moment magnifiquement délectable. On a beau avoir peu, on a beau manger des frijoles et des tortillas deux fois par jour avec un café noir pour faire passer le tout, la famille, les amis, l’entraide, la beauté de la nature sont tous des facteurs allégeant les pépins de pomme de notre vie des plus ardues. Ce n’est pas parce qu’une femme porte un hijab qu’elle n’est pas heureuse dans la vie. Oh! Elle pourrait probablement trouver le bonheur autrement, qui sait, mais l’un n’empêche pas l’autre. Ce n’est pas non plus parce qu’une maman reste au foyer à élever ses enfants pendant que papa travaille qu’elle est vouée à être moins heureuse que moi qui me démène au travail comme un beau diable dans l’eau bénite. Ce n’est pas parce qu’on pratique une religion assidument qu’on est moins heureux qu’un athée (amen). L’un voit le religieux comme étant encarcané dans des dogmes castrateurs à n’en plus finir, l’autre voit le sceptique prisonnier de son scepticisme gonfleur d’égo. Aucune culture ne peut prétendre flirter avec la perfection. On est simplement plus à l’aise avec ce que l’on connaît, et ça réveille involontairement une forme de chauvinisme parfois mal placé, parfois justifié. C’est toujours plus beau chez nous, plus accueillant, plus propre, plus ouvert, plus confortable, plus instruit… Plus est le mot préféré des chauvins, c’est comme ça, à la maison, c’est «plusse mieux». Ici, on oublie vite la collusion et la mollesse du peuple qui tend à «s’aplaventrir» pas mal vite dans les débats. J’ai entendu le même type de discours en Turquie, qui oublie vite la censure et les guéguerres politiques internes, puis en Égypte avec sa corruption systémique, et au Mexique aussi, avec son narcotrafic bien ancré. Pas grave. C’est chez eux, c’est mieux. Et ici, c’est chez nous, c’est mieux itou, mon minou.

Accueillir le dépaysement


Un jour, j’ai décidé d’ouvrir les bras comme une vraie «matante» et d’accueillir le dépaysement comme un vieil ami qui revient au bercail. Ça m’a fait du bien à l’âme et à l’attitude. J’ai pris tout le package deal, je n’ai rien laissé, pas une miette. J’ai gobé tout l’inconfort, tous les malaises, tous les amalgames faciles, toutes les situations un brin déconcertantes. J’ai sué comme une truie dégoulinante à 45°C, j’ai fait face au «clisse» de vent islandais et à sa pluie diluvienne en me plantant les deux pieds dans la falaise comme des poteaux de téléphone dans la brume, je me suis brûlée la langue à ingérer du piment à outrance et j’ai grimacé en mangeant du poulet au chocolat. J’ai dévoré des tas de croustilles à la menthe et de petits gâteaux au pandanus, goûté un scorpion et de l’alcool de cobra, mangé des grillons dans des quesadillas, des couilles de je ne sais trop quelle bestioles, et de la cervelle (il ne faut pas oublier cet met délicat!). Le dépaysement est un cadeau, il nous rend fort, il nous rend tolérant, il fait de nous une meilleure personne et surtout, il ne tue pas, contrairement à d’autres maladies. Se laisser bercer par ses mélodies un brin chaotiques permet à l’homme de grandir, de s’immiscer dans des scénarios dignes d’Hollywood (ou de Bollywood, si tu as atterri par inadvertance sur une plage de Goa). Il y a plusieurs formes de dépaysement, d’ailleurs. Celui des yeux, celui des papilles, celui des oreilles. Oui, le son peut être très déstabilisant, surtout la musicalité d’une langue qu’on ne connait pas et qui déflore nos tympans encore vierges de ces nouvelles tonalités parfois sensuelles parfois hardcore. Une symphonie langagière, orgasme auditive assuré!

Croire en l'humain


Il s’avère nécessaire de croire en l’Humain avec un grand H (et non pas badigeonné de Préparation H), malgré que plusieurs d’entre eux nous font amèrement regretter de faire confiance. Ils sont un frein rédhibitoire à l’avancement du monde. Les idioties à la Trump (ah! Elle est ici, la préparation H), la folie à la Kim Jung-Un, l’État Islamique, la Meute, la maudite folle du bureau, Ronald McDonald (ben quoi, il y a un humain sous ce costume de bouffon, et il me fout la trouille!) et autres flagorneurs de tous acabits… Tous ces hurluberlus ne doivent pas nous empêcher d’avoir de l’empathie pour l’autre, d’oser faire confiance en la justice, d’espérer que la pensée humaine soit capable de grandes choses empreintes de positivisme pour notre petite planète bleue. Nous sommes capables d’immenses accomplissements si on y met du sien juste un peu. On peut changer le monde, carrément, avec notre bon vouloir et notre capacité à persuader autrui de sauter à pieds joints dans LE projet. L’humain est une bien mignonne petite bête pas toujours élevée adéquatement et qui perd du poil, certes, mais qui a le potentiel de soulever des montagnes avec les auriculaires, ni plus ni moins. C’est beau tout ça, hein? Certains diront que je suis une rêveuse finie, que je pellète des nuages, que je vis dans le monde des Calinours et des licornes… Non, je vis avec l’envie de croire qu’il reste de la bonté ici, et qu’elle servira à tous.


Le jour où j’ai déverrouillé mon esprit, j’ai eu instantanément les cheveux au vent, et comme une harpe jouée par les mains habiles de la brise, ils sont devenus de magnifiques notes de musiques. J’ai ouvert les yeux en même temps et j’ai vu pour la toute première fois. J’ai découvert mes voisins, mes racines, la beauté du soleil qui tombe sur le fleuve comme une bombe de bain effervescente… Et je n’ai jamais regretté d’un seul iota d’avoir défroissé mes ailes de papillons.


[1] Stop, des Spice Girls.




| par La vie est un piment

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