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Il n'y a pas mort d'homme...



«La vie, c’est une panique dans un théâtre en feu.» (Jean-Paul Sartre)


Je commence sérieusement à me questionner sur la capacité de l'être humain à faire face aux pacotilles d'embuches sur sa route sans sombrer dans l'enfer du doute, de la panique et l'allumage involontaire d'incendies. Non seulement notre monde n'a pas assez de pompiers pour éteindre tous les feux laissés par ces individus en fausse crise existentielle perpétuelle, mais en plus, ça nous force à nager à contre-courant dans leur swamp de négativisme. Est-ce notre grande accessibilité aux productions cinématographiques et aux fictions en tous genres qui nous ramollissent le cerveau jusqu'à en faire de la guimauve? On a de plus en plus tendance à se faire tout un cinéma dès que le monde ne tourne plus à la vitesse grand V que l'on avait tant espéré, et on tend à s'inventer des difficultés un peu simplistes, comme si elles étaient essentielles à notre vie. Je présume que nos problèmes bidons nous donnent une excellente excuse pour contourner les véritables plaies que l'on devrait soigner.


IL N'Y A PAS MORT D'HOMME s'il pleut pendant tes vacances.


Je suis la première à péter un plomb quand on parle d'hiver, de neige et de «frette», je plaide coupable à l'accusation, mais à ma défense, votre honneur, je ne fais qu'entretenir la légende du personnage qui abhorre l'hiver comme ce n'est pas possible pour faire rire la galerie. En vérité, je vis bien avec la saison froide, et elle ne m'empêche pas de continuer ma trépidante existence un peu fofolle. Cela dit, ce que je n'arrive pas à comprendre, et ça me chicote pas mal, j'avoue, ce sont tous ces gens qui prennent des vacances et qui en reviennent dépités (pour ne pas dire fucked up) à cause du climat ratoureux, comme si un seul plan avait été prévu pour les deux semaines de congé en faisant fi des risques météorologiques de notre charmante province pourtant si imprévisible côté météo. Oh! Le drame! Il a plu des torrents! Pendant une semaine et demi sur deux! Sacrilège! Hé oui, shit happens. Parfois, la pluie est une délicieuse excuse pour te forcer un peu à prendre soin de toi, un truc que tu fais de moins en moins: Rattraper une série télévisée que tu voulais tant regarder, flâner en pyjama toute la journée, cuisiner des trucs que tu ne fais pas souvent, jouer avec tes enfants, lire, prendre un bon bain moussant bien chaud à la lueur des chandelles, te mettre beau ou belle. Tu peux aussi aller dehors quand-même et singing in the rain [1] en faisant de joyeuses «steppettes»; les imperméables ne sont pas une légende urbaine, ils existent vraiment et sont même utiles, au cas où tu l'ignorais. Et ne dit-on pas qu'après la pluie vient le beau temps?

Il N'Y A PAS DE QUOI CRIER AU LOUP lorsque ton enfant voyage.


Si les voyages forment la jeunesse, ils angoissent aussi les parents de ceux qui décident qu'il faut que jeunesse se fasse. Il est vrai que l'humain est exposé de plus en plus jeune à l'immensité de la planète bleue, à ses excentricités, à ses paradis cachés. Un parent s'inquiétera toujours de son enfant quand celui-ci n'est pas à ses côtés, mais il ne faut pas virer sur le top à chaque fois que son marmot saute à pieds joints dans ses valises pour une nouvelle destination inusitée. «Oui, mais il y a eu la guerre, là-bas!». Mais si la guerre est f-i-fi-n-i-nie finie et qu'on reste prudent, en quoi est-ce dramatique au point d'en faire une crise d'urticaire? Il y a déjà eu la guerre en Italie aussi. Ça fait partie de l'histoire du monde. «Oui, mais il y a du terrorisme là-bas». Ah! Le fameux risque de crever dans un attentat terroriste, bonté divine... Savais-tu qu'il est moins élevé que de se faire frapper par un char? «Ma fille peut se faire kidnapper». Ça, on l'entend dès qu'une fille voyage seule. C'est le cliché de la belle naïve qui va se laisser emberlificoter par un quelconque voyou. Heille! On n'est pas dans le film L'enlèvement [2] avec Liam Neeson, come on! C'est certain que si elle va se balader en Somalie en solo, elle joue à la roulette russe, mais j'aimerais bien savoir le nombre exact de Québécoises qui voyagent dans ces eaux-là, pour le fun. Je dis ça, je dis rien, remarque. «Là-bas, c'est l'Islam». Oui, et ici, c'est Pepsi. Dans les pays musulmans, les gens mangent, font dodo, vont travailler et se divertissent comme ailleurs. L'Islam, cette nouvelle pseudo menace qui détruira le monde (selon la droite extrême et ses disciples), existe pourtant depuis des siècles. La plupart de ceux qui craignent l'Islam n'ont jamais parlé à un Musulman de leur vie et ne se fient qu'à la télé, qui comme on le sait, aime bien vendre. Et la peur, ma foi, c'est un excellent vendeur.


Ton enfant part en voyage? Quelle chance tu as! Il deviendra un citoyen du monde plus ouvert et à l'écoute, plus débrouillard et moins trouillard. Voyager, c'est comme le reste: Les risques s'y rattachant existent et nous sont amplement rappelés quand on fait des recherches avant le départ. Si tu roules avec quelqu'un sur une route et que tu croises une pancarte «zone de chevreuils», tu n'as pas besoin de hurler au conducteur d'un ton alarmiste: «Attention, c'est une zone de chevreuil ici». C'est pareil avec ton enfant. Lui rappeler de se préparer est une chose, lui déblatérer sans arrêt et avec les genoux qui claquent tous les risques qu'il encourt à sortir de la maison, c'est déraisonnable et c'est te faire violence à toi-même plutôt qu'à lui.

Il N'Y A PAS PANIQUE À PÉKIN si ton équipe sportive ne fait pas les playoffs


Ton club chouchou va plus que mal, il est sur respirateur artificiel et peine à se remettre de mauvaises transactions, des décisions douteuses de l'entraîneur ou de la paresse phénoménale de son joueur vedette? Comme il s'enligne pour rater les séries, tu es sur le bord du gouffre, prêt à plonger dans l'antre de la dépression et tu n'as plus d'ongles à force de les avoir rongés. Je tiens à te rappeler un petit quelque chose de rien du tout: C'est du freaking divertissement! Rien que du divertissement! Personne n'est sur le point de rendre l'âme (sauf toi peut-être, depuis que tu as arrêté de manger tes trois repas par jour), et le hockey, le football, le soccer, le baseball et la course automobile, c'est du sérieux... en théorie seulement. J'ai un billet de saison de l'Impact de Montréal, et même si j'ai été amèrement déçue de ses performances de 2017, j'avale ma pilule, je prends mon gaz égal et je me dis que dans le monde, il y a des enfants qui ne mangent pas à leur faim et qui se sacrent pas mal des performances du bleu-blanc-noir. Lorsque le sport est le centre de ta vie, mais que tu n'es ni athlète ni journaliste sportif, déjà, il y a un problème. Le CH n'a pas gagné de coupe Stanley depuis des décennies! Est-ce que ça veut dire que tu passes des hivers à ruminer comme une vache folle depuis plus de vingt ans? Si la réponse est oui, vite, vite, va en thérapie, fais quelque chose, tu ne peux pas passer le reste de tes jours crispé comme un curé catapulté dans un show de Heavy Metal! C'est mauvais pour ta régularité et pour ton p'tit cœur après neuf heure.

CE N'EST PAS LA FIN DU MONDE si tu es célibataire, quarantenaire, et qu'on te pose un lapin.


Tu es célibataire de nouveau? Tu as pourtant entendu toute ta vie que «chaque torchon trouve sa guenille», et là, tu te demandes si tu n'as pas cru au Père-Noël pendant tout ce temps sans le savoir. Tu as quarante ans et des poussières, tu as envie d'amour et d'eau fraîche, mais tu n'obtiens que les miettes qui dorment dans le fond du sac de chips? Qu'à cela ne tienne, la vie ne se limite pas qu'à la vie de couple, même si les câlins matinaux, le «minouchage» amoureux et le concept de vieillir à deux sont des idées fort alléchantes. Si tu te définis par ton célibat endurci avant toute chose, tu n'es probablement pas outillé adéquatement pour remplir les vides du quotidien. Même si certains vides doivent justement rester tels quels, d'autres n'attendent qu'à être comblés par tout ce qui nous fait vibrer, la musique, les voyages, les amitiés indéfectibles, le sport, la spiritualité. C'est tout à fait légitime de vouloir trouver la perle rare, cela dit. On ouvre les yeux, on explore les sites de rencontre, on accepte des blind dates... On se plante plus souvent qu'à son tour, mais c'est normal. Tu t'es fait poser un lapin la semaine dernière? Bof! Dis-toi que le dude ou la dudette ne sait pas ce qu'il a manqué, et que tant qu'à passer une soirée avec quelqu'un qui n'a pas envie de ce que tu as envie, aussi bien s'abstenir. On est d'ailleurs toujours mieux seul que mal accompagné, comme le dit si bien mon papa. Oui, c'est peut-être un lieu commun un peu fafa, mais qui a envie de traîner un boulet à sa cheville toute sa vie en se disant: «Maudit que j'étais bien seul...»? Pas toi. Si tu choisis d'attendre qu'une tendre moitié se pointe pour te réaliser, tu perds de précieuses minutes à l'horloge de ta vie.

Il N'Y A PAS DE QUOI FAIRE UN PLAT si tu n'es pas J-Lo.


J'ai choisi l'exemple de J-Lo car elle est canon, même à presque cinquante ans. Sais-tu quoi? Je ne suis pas Jenny from the Block. Je ne t'apprends rien, hein? Et ça me convient d'être moi au lieu d'elle, en fait, même si ça semble prétentieux, écrit de même. Certes, j'aimerais bien avoir son compte en banque et pouvoir porter des pantalons comme elle les porte (Mon popotin est plutôt plat, vois-tu, et mes hanches moins définies que les siennes.). Je trouve quand-même toujours de quoi porter pour me mettre en valeur. Qu'on soit échalote ou éléphante, qu'on soit plat comme une galette ou tout en courbes, on ne devrait jamais s'empêcher de vivre ses rêves ni faire des crisettes avant de sortir en ville en pensant des «je suis grosse comme une tour» et des «je n'ai pas de robe qui me va». Ne pas correspondre aux standards de beauté connus n'est pas une raison pour ne pas faire du sport. Ce n'est pas une raison non plus pour éviter de sortir en public ou pour refuser une invitation d'un galant ou d'une potentielle dulcinée. C'est du drame inutile, et ton apitoiement ne te rendra pas plus beau. Déjà, pourquoi te fais-tu violence en te comparant comme ça à des stars qui peuvent camoufler toutes leurs imperfections sous des robes et des vestons à des milliers de balles, et qui utilisent le Photoshop à outrance?


T'es pas le seul à être ballonné après avoir englouti une tonne de produits laitiers. Tu grisonnes à trente ans et ça t'énerve royalement? Tu perds des cheveux? Tu rides de manière précoce? Ton nez est un peu croche? Si tu regardes tout autour, tu en trouveras toujours un plus hideux que toi dans les parages. Le jour où tu t'empêches de sortir parce que tu ne te trouves pas assez ou un peu trop, aussi bien t'acheter une chaise berçante car tu ne feras plus rien d'autres que de pantoufler à la maison. Assumer son corps, c'est un apprentissage. Jean-Jacques Rousseau te dirais probablement d'avoir moins d'amour-propre et plus d'amour de soi. Si tu n'y travailles pas assidument, tu n'y arriveras que dalle. Et fuck you J-Lo!

CE N'EST PAS LA MER À BOIRE si tu ne plais pas à tout le monde.


Ta collègue ne peut pas te sentir et te le montre aussi régulièrement qu'un métronome? La meilleure amie de ta blonde te scrute avec de gros yeux pas gentils à chaque fois que tu ouvres la bouche? Tu te fais critiquer pour ton style de vie qui sort un peu des lignes toutes tracées? Tu ne t'entends pas avec ta cousine qui semble te juger de la tête aux pieds avec un regard de dégoût dès que tu es dans la même pièce qu'elle? J'espère que ça ne te ronge pas trop de l'intérieur! On est presque sept milliards d'humains sur Terre, imagine! Tu ne peux donc pas plaire à tout le monde, et ce serait une perte de temps insensée que de travailler à y arriver. Pourquoi ramènes-tu à la maison l'angoisse de ne pas avoir fait l'unanimité à chaque soir comme un entêté? L'important, c'est ceux qui t'aiment, pas ceux qui ne peuvent pas te voir en peinture! Nous, les hommes, on a ce détestable besoin de plaire à tout prix, mais comme on ne contrôle ni la jalousie d'autrui ni la méchanceté propre à certains individus, ça ne fonctionne juste pas. On ne choisit pas sa famille non-plus, d'ailleurs, et il peut arriver par inadvertance que les liens du sang soient moins forts que ceux qui nous lient à nos amis, qui eux, font partie de notre vie parce qu'on l'a bien voulu. Si quelqu'un ne t'aime pas trop la face, pourquoi ne pas simplement hausser les épaules et continuer ton chemin en sifflotant vers d'autres visages, d'autres aventures, d'autres rencontres plus positives? Si tu n'es pas capable de ne pas plaire, j'en déduis que tu es atteint d'un syndrome de séduction compulsive. Si s'en est presque maladif, que tu serais prêt à faire n'importe quoi pour attirer l'attention de quelqu'un dans le but de te faire aimer, que ça t'empêche de dormir à tous les soirs et que ça te semble effectivement la mer à boire, tu as peut-être un trouble de la personnalité histrionique [3] ou une pathologie du genre... Je ne suis pas docteur, enfin, alors je te laisse la joie immense (#not) de te faire soigner au besoin.

Bref...


Non, il n'y a pas de quoi faire une montagne avec le quotidien, si tu as une santé de béton, des amis fidèles, des rêves à chérir et des projets à réaliser. Peu importe qu'il pleuve des torrents ou qu'il fasse beau dans ta fin de semaine de congé, que tu sois près de tes marmots ou qu'ils soient au bout du monde et même au-delà à «chiller» comme des damnés, que tu sois marié, acoquiné, en couple ou célibataire professionnel, que tu aies les fesses rebondies comme un joueur de baseball, des pamplemousses en guise de sein, ou que tu ressembles à un nain de jardin en attente de sa poussée de croissance, que les trois quarts de la planète te détestent... tu as encore le choix de vivre les histoires que tu as toujours voulu écrire. Tu as le droit au bonheur. Tu mérites de faire un doigt d'honneur à tes détracteurs. Tu peux ménager tes nerfs un brin fragiles en ne théâtralisant pas ton existence en excès. Toutes les crises existentielles que tu vis doivent en valoir la peine. Toutes les autres crises, toute la panique inutile générée par nos tentatives de contrôler l'incontrôlable, viennent encombrer le tapis rouge de notre présent.


Le mot de la fin, je le laisse à Shakespeare, qui a su résumer avec éloquence MON état d'esprit face à ceux qui se freinent en permanence: «C'est de ta peur que j'ai peur.».


Tout est dit.


[1] Chanson tirée du film du même nom, et interprétée par Gene Kelly.


[2] L'Enlèvement, film réalisé par Pierre Morel et scénarisé par Luc Besson.




| par La vie est un piment

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